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2 janvier 2013 3 02 /01 /janvier /2013 16:38

Congo-Elections

 

Sassou continue de provoquer le peuple congolais

 

Dans son message à la Nation le Chef de l’État congolais a affirmé le 31 décembre 2012 avec force que les élections législatives de juillet et août derniers s’étaient déroulées « dans la transparence ». Pourtant, à l’instar des scrutins de ces dix dernières années, ces législatives ont été entachées de graves dysfonctionnements et de fraudes massives. L’autosatisfaction du Big Boss de Mpila est donc une moquerie à l’égard du peuple congolais dont lui et ses missi dominici se jouent copieusement. Une moquerie qui pourrait être vue comme une provocation à l’encontre de tout citoyen épris des valeurs démocratiques. C’est ainsi que l’Accusateur se propose de publier un article paru dans le magazine « Métropolis » au lendemain du premier de ces législatives qualifiées de la honte par plusieurs observateurs.

 

 

Premier tour des législatives 2012

  

Le peuple a encore tout perdu 

 

Le premier tour des législatives 2012 a eu lieu le 15 juillet. Mais la voix du peuple semble n’avoir pas été entendue. Fraudes, dysfonctionnements et surtout non application des textes régissant les élections ont marqué ce scrutin. Esquisse d’analyse de la première phase de ce scrutin.

 

Un scrutin hors du commun ! C’est ce que le peuple congolais dans son ensemble a vécu le 15 juillet, lors du premier tour des législatives 2012. Ce dimanche-là, tout le monde s’était préparé en connaissance de cause afin d’envoyer un émissaire à l’Assemblée Nationale pour l’y représenter. Mais, plusieurs bureaux de vote n’ont pas ouvert à 7 heures, comme l’indique l’article 79 de la loi électorale du 24 novembre 2001. Il fallait attendre presque l’après-midi (cas de certains bureaux de Pointe-Noire) pour que démarre le vote. Les causes de ce retard sont multiples. Tout le monde ou presque a évoqué l’arrivée très tardive du matériel (cartes d’électeurs, urnes, isoloirs, bulletins…). Certains observateurs sont cependant allés plus loin. «C’est fait exprès, question de mijoter leurs fraudes», a expliqué le jour du vote un habitant de la deuxième circonscription de l’arrondissement 2 Mvoumvou.

 

À cause de ce retard, certains électeurs se sont lassés et sont retournés chez eux. Si bien que les membres des bureaux de vote ont eu assez de temps pour des causeries. Certains s’endormaient même faute d’électeurs. Selon l’Observatoire Congolais des Droits de l’Homme (OCDH), on a noté par exemple à Pointe-Noire, un très faible taux de participation oscillant entre 8 et 12% dans la plupart des bureaux de vote. Soit un taux d’abstention de près de 90%.

 

Or, le démarrage tardif des opérations de vote est loin d’être l’unique cause de la forte abstention observée au premier tour des législatives. D’autres raisons existent. Et la raison privilégiée par les populations réside dans les pratiques peu orthodoxes enregistrées aux scrutins passés. Si certains Congolais ont fait partie de la législature sortante, c’est sans doute parce qu’ils auront été élus, non pas par le peuple, plutôt à leur manière. À moins d’être foncièrement antidémocrate pour admettre que des voix issues d’une urne préalablement bourrée reflètent bel et bien la volonté du peuple. À moins que nous soyons partisans de l’anarchisme politique pour accepter qu’un candidat séquestre des cartes d’électeurs, les distribue à quiconque voterait pour lui moyennant des espèces sonnantes et trébuchantes.

 

Il y a bien d’autres pratiques blâmables, démocratiquement parlant. «On a joué au qui perd gagne ! », s’exclamait en 2007 un membre de l’Union Panafricaine pour la Démocratie Sociale (UPADS), parti de l’opposition. Que n’a-t-on pas vu lors des législatives de 2007 ? Jusqu’ici, on a toujours eu du mal à comprendre comment et pourquoi, un candidat a été déclaré vainqueur par l’administration alors que selon les procès verbaux dûment signés par les membres des bureaux de vote ainsi que les représentants des candidats ou des partis, ce monsieur avait été battu à plate-couture dès le premier tour. Un fait que les pouvoirs publics n’ont jamais expliqué. De quoi donner la latitude au peuple de se faire sa propre interprétation. «Que je vote ou pas, le vainqueur est déjà connu. Inutile de gaspiller mon précieux temps pour ça»,  soulignait l’après-midi du 15 juillet une femme d la première circonscription de l’arrondissement 3 Tié-Tié.

Comme tout le monde a pu le constater, les scénarii de 2007 (législatives), 2008 (locales) et 2009 (présidentielle) ont été les mêmes qu’en 2012. Comme si les Congolais du sommet à la base étaient ennemis de la décence, de l’intégrité morale et intellectuelle, bref de la bonne gouvernance démocratique. Les législatives se sont certes déroulées dans un climat apaisé, mais tôt ou tard on réalisera que le Congo s’est enfoncé davantage dans les décombres d’une démocratie que l’élite politique et intellectuelle ne fait que briser chaque jour. Ce, beaucoup plus par prévarication que par inadvertance.

 

Ainsi qu’a-t-on fait de la Constitution de 2002 ? Qu’a-t-on fait de la loi électorale ? Qu’a-t-on de la fameuse concertation d’Ewo ? Voilà de précieux instruments auxquels on aurait dû recourir pour organiser un scrutin législatif dans la transparence, l’apaisement et la liberté, comme l’avait promis en fin 2011 le Chef de l’Etat. C’est pourtant la classe politique congolaise dans son ensemble qui a expressément saboté les textes et les instructions du Président de la République. Si l’on peut admettre que tous les dysfonctionnements liés à ces législatives ont été orchestrés intentionnellement, il est dans l’ordre des choses de déduire que ces futurs honorables et camarades responsables administratifs et politiques ont une autre conception du Congo. Dans leur psychisme, le Congo n’est pas une république, plutôt un royaume  où seuls les intérêts du souverain comptent au détriment de ceux du citoyen lambda.

 

Mais ce qui interpelle quand même la conscience des uns et des autres, c’est que ces mêmes autorités ont l’art de maquiller tout ce qu’il y a d’anormal lorsqu’elles rencontrent leurs homologues de l’étranger. «Le Congo, havre de paix », «Le Congo sur la voie de l’émergence », «Tout va bien, les indicateurs sont au vert »…Qu’ils ont l’art de bâtir de belles phrases et formuler des concepts agréables à l’oreille ! Pourtant, il serait également bien de prouver avec une rigueur mathématique s’il est possible de bâtir une nation solide sur la base des injustices. Que chacun démontre qu’on peut émerger économiquement quand des vices comme la corruption, la fraude, l’injustice, le banditisme et d’autres antivaleurs font partie des fils conducteurs de ceux à qui le peuple a confié la noble responsabilité de gérer la chose publique. Qui leur a dit que la paix se consolide avec autant de frustration du peuple ? Un peuple dont la volonté est toujours copieusement bafouée peut-il se considérer comme démocrate ? Autant de comptes à rendre à la postérité qui doit certainement nous attendre au tournant de l’histoire universelle.

 

Comme quoi, le peuple congolais qui se veut foncièrement démocrate a encore tout perdu. Sa dignité, son honneur et surtout son pouvoir viennent une fois de plus se morfondre dans une sorte de saga antidémocratique savamment organisée par la classe politique.

 

John Ndinga-Ngoma

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